Maîtriser sa consommation d’écrans: une large gamme d’outils pour tous âges et toutes situations

Raphaëlle Coquebert
Raphaëlle Coquebert
Maîtriser sa consommation d’écrans: une large gamme d’outils pour tous âges et toutes situations

Confrontés au désarroi des parents face aux défis posés par les nouvelles technologies, Gaëtane et Cyril Markt ont résolu de se reconvertir professionnellement pour créer DYKTIA. Leur objectif ? Aider à une prise de conscience collective sur ce sujet et donner des pistes pour un meilleur usage des outils numériques.

Cyril

Bonjour Cyril, quel a été votre parcours à tous les deux avant la création de Dyktia ? 

En ce qui me concerne, j’ai été informaticien en entreprise durant une vingtaine d’années. Je commençais à avoir fait le tour de mon métier quand ma femme a eu envie de fonder une association centrée sur le bon usage des écrans. L’un comme l’autre, nous avions constaté durant des années d’implication en éducation affective et sexuelle auprès des jeunes, via TeenStar, combien la pornographie était répandue. 

Après avoir été assistante sociale en milieu scolaire puis animatrice en pastorale, ma femme Gaëtane a de nouveau été confrontée à cet état de fait en participant au lancement du pôle formation en éducation sexuelle et affective de la DDEC (Direction Diocésaine de l'Enseignement Catholique) de notre département, le Morbihan. Peu à peu, elle a constaté qu’au-delà de la question de la pornographie, les parents étaient démunis face à l’invasion des écrans dans le quotidien de leurs enfants.

En 2019, elle a donc résolu de quitter son poste pour créer une association, qui a peu à peu élargi son champ d’action, jusqu’à devenir aussi un organisme de formation. En mesurant l’ampleur des problèmes et des demandes, j’ai eu envie de rejoindre l’aventure et j’ai sauté le pas. 

Gaëtane

DYKTIA ne s’adresse donc plus seulement aux parents ?

Elle s’adresse à tous ceux qui sont confrontés aux nouvelles technologies au quotidien, c’est-à dire à une bonne partie de la population : les éducateurs, le personnel scolaire, le personnel médical…. Et bien sûr les parents et leurs enfants.

… On s’est rendu compte que l’éducation des jeunes au numérique était un sujet dans l’air du temps mais qu’il nécessitait que les adultes eux-mêmes analysent et régulent leur pratique. Comment convaincre sans donner soi-même l’exemple ? Or tout le monde est concerné aujourd’hui par la question du temps passé sur les outils numériques. Ce sont des outils formidables, mais garder le contrôle sur eux s’avère très difficile. C’est un problème d’ordre collectif.

Comment l’expliquez-vous ?

Nul ne peut prétendre aujourd’hui se passer des écrans : ils servent à communiquer, travailler, faire ses courses, payer, réserver son train, s’orienter etc. Insidieusement, nous sommes à peu près tous embarqués dans ce mouvement parce que le modèle économique dominant, l'économie de l'attention1 fonctionne sur la captation de nos données à des fins publicitaires : pour maximiser la collecte de données, Google et consorts ont donc étudié le fonctionnement de notre cerveau, notre comportement… afin de savoir comment retenir le plus possible notre attention. 

Aussi sommes-nous tous concernés par le problème, même si notre usage s’appuie sur les meilleures intentions du monde (les groupes WhatsApp pour une cause associative, pour resserrer les liens familiaux ou amicaux…) Avec l’expérience, nous avons d’ailleurs mesuré qu’il fallait s’attaquer au problème dès la petite enfance avant que ne soient ancrées de mauvaises habitudes.

La question des écrans se traite dès la petite enfance ?

Oui. Au lancement de l’association, nous intervenions essentiellement auprès des élèves et parents d’élèves de primaire et secondaire. Au fur et à mesure, nous avons constaté que la prévention devait se faire très en amont. Depuis deux ans, nous travaillons beaucoup auprès de la tranche 3-7 ans pour limiter l’installation d’habitudes mauvaises, notamment cette fameuse technoférence qui perturbe la relation parents-enfants. Ce concept inventé en 2018 désigne « les interruptions quotidiennes des interactions interpersonnelles ou du temps passé ensemble qui se produisent à cause des appareils de technologie numérique et mobile ». L’impact délétère de ces derniers sur la santé et les apprentissages (le développement du langage, la socialisation…) est aujourd’hui reconnu.

Les parents sont-ils réceptifs à vos mises en garde ?

Il y a les parents convaincus qui recherchent des outils pour mettre des freins à l’hyper-connexion de leurs enfants. Mais il y a aussi ceux qui ne voient pas ou ne veulent pas voir le problème, parce que ça les arrange (ils peuvent souffler quand leur progéniture est rivée aux écrans). L’enjeu est donc de toucher ce public, de le mettre en route en trouvant une façon originale d’aborder le sujet sans faire la morale. 

Nous avons opté pour un spectacle de marionnettes « Maman, je m’ennuie » et un autre de Skramm koet (« écran de bois » en breton), nouveau concept à la croisée de la marionnette et du Kamishibaï2, théâtre japonais. Nous donnons ces spectacles dans des médiathèques, des classes de maternelle ou primaire… si possible en présence des parents. Sinon, on leur fait passer un livret illustré, pour poursuivre l’action à la maison. L’implication des parents, en tant que premiers éducateurs de leurs enfants, est primordiale.

À quelles problématiques êtes-vous confrontés après la petite enfance ?

Que ce soit par accident ou curiosité, pléthore d’enfants sont exposés à des contenus inadaptés à leur âge : violence, images à caractère sexuel… Puis, ils jouent de plus en plus tôt à des jeux en ligne avec des inconnus sans mesurer qu’ils peuvent vite se retrouver en difficulté (insultes qui fusent, personnes mal intentionnées…)

À l’adolescence, ce sont d’autres enjeux, non moins graves : le cyberharcèlement, la comparaison avec les copains qui mettent leur vie en scène via les réseaux sociaux. L’impact sur l’estime de soi, si bringuebalante à cet âge, peut être dévastateur.

Au lycée, beaucoup de jeunes sont conscients que les écrans tiennent trop de place dans leur vie. Ils aspirent à reprendre le contrôle. 

Quels outils proposez-vous aux uns et aux autres ?

Dans le Grand Ouest (Bretagne-Vendée-Normandie), Gaëtane, moi et nos collaborateurs intervenons en présentiel dans diverses structures (centres de loisirs, établissements scolaires, paroisses, associations, etc.) Nous avons également ouvert il y a un an un lieu d’accueil à Hennebont (Morbihan) où sont proposés des actions de sensibilisation, des formations, des ateliers, des entretiens individuels pour des adultes ou familles confronté(e)s à une addiction ou une difficulté éducative… En attendant la mise en place d’un centre d’accompagnement avec hébergement pour accueillir les personnes quand le traitement s’inscrit dans la durée et nécessite une mise à l’écart.

Nous nous déplaçons également sur tout le territoire dans le cadre de formations professionnelles (Dyktia a obtenu la Certification Qualiopi) : les éducateurs, le personnel enseignant ou médical, les animateurs etc. peuvent s’inscrire aux formations que nous proposons sur catalogue (voir ici pour une idée des thèmes abordés) ou bénéficier d’une formation sur mesure établie en fonction de leurs besoins. 

Pour les particuliers, il est possible de se greffer à ces formations ou de constituer un groupe (au moins 8 personnes) auprès duquel nous intervenons à distance voire en présentiel. N’hésitez pas à nous contacter : la palette de nos propositions est vaste !

En pratique : www.dyktia.fr 

Retrouvez Cyril sur www.youtube.com/watch?v=fcZT2zm6d2U&t=100s

1 L'économie de l'attention décrit la marchandisation de l'attention humaine à l'ère numérique. Entreprises, spécialistes du marketing et créateurs de contenu rivalisent pour capter l'attention limitée des consommateurs dans un monde saturé d'informations.

2 Le kamishibai (en japonais « pièce de théâtre sur papier ») est une sorte de théâtre ambulant où des artistes racontent des histoires en faisant défiler des illustrations devant les spectateurs.

NB : Si vous sentez que votre rapport aux écrans vous pollue, n'hésitez pas à prendre rendez-vous au sein de l'Accueil Louis et Zélie le plus proche de chez vous. S’il n'y en a pas, contactez-nous pour que l’on trouve ensemble une solution. Nous sommes à votre écoute.

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